Un reportage EQDA
Trente-cinq degrés à l’extérieur, vingt degrés dans le bureau hyper climatisé du professeur Benjamin Yao. Le contraste est saisissant. Le responsable du programme Moocs à l’INP-HB nous accueille en nous montrant un boîtier wifi: «J’ai dû l’acheter moi-même pour que mes doctorants puissent suivre des Moocs.»
«Je n’arrive pas à comprendre pourquoi, dans un pays pauvre comme le nôtre, internet est si cher.» Benjamin Yao
Il nous explique que ses étudiants peuvent ainsi suivre en ligne certains cours spécifiques, qui ne peuvent pas être donnés à Yamoussoukro. «Pour moi, les Moocs, c’est du pain béni», résume celui qui est aussi directeur de l’École doctorale polytechnique.
L’accès limité au web menace toutefois d’anéantir les efforts entrepris par l’équipe de Benjamin Yao pour intégrer les Moocs à la formation. Il se dit «outré» de constater qu’il n’arrive jamais à obtenir le débit de connexion pour lequel il paie. «Ca frise l’escroquerie! Et je n’arrive pas non plus à comprendre pourquoi, dans un pays pauvre comme le nôtre, internet est si cher.»
«LA CONNAISSANCE N’EST VALABLE QUE LORSQU’ELLE EST PARTAGEE »
En attendant une évolution, l’INP-HB, avec l’appui de l’Epfl, tente de mettre en place un réseau interne à l’école qui permet aux étudiants d’avoir accès aux vidéos des cours grâce à un serveur local. L’Epfl a aussi installé une antenne satellite qui devrait permettre aux étudiants d’avoir un accès internet uniquement dédié au Moocs, notamment pour poser des questions sur des forums de discussion ou rendre des exercices.
Des centaines de professeurs ivoiriens sont aussi prêts à se lancer dans l’enregistrement de Moocs. L’Epfl invite notamment des enseignants à participer à des semaines de formation, tout comme l’Agence universitaire de la Francophonie (AUF) qui organise aussi des séminaires.
C’est en quelque sort mettre la charrue avant les bœufs, estime Roger Kpon. Le directeur informatique au Centre Suisse de Recherches Scientifiques en Côte d’Ivoire est aussi formateur pour le compte de l’AUF. «A Abidjan, des centaines de professeurs ont appris à créer des Moocs, mais il n’y a pas vraiment eu de suite, car ils n’ont ni le matériel, ni un accès à internet qui leur permettent de produire des cours en ligne.»
Le spécialiste croit au potentiel des Moocs pour autant qu’ils soient accessibles à tous les étudiants. «La connaissance n’est valable que lorsqu’elle est partagée», conclut-il.
Photos : Flurina Rothenberger