Un reportage EQDA
Banglaore (ats) Les banques de semences sont désormais légion en Inde. L’une des pionnières, Sahaja Samrudha, est à la pointe de ce courant, notamment en faisant le lien entre méthodes organiques et consommateur.
« Les semences constituent la base de l’agriculture. Si les paysans perdent leurs semences, ils perdent leurs terres et doivent migrer vers les villes ». Dans son petit bureau de quartier dans la mégapole technologique Bangalore, dans le sud de l’Inde, le directeur Krishna Prasad évoque les 8000 agriculteurs regroupés par l’ONG qui cultivent le riz organique et 300 le millet.
Ici, « les agriculteurs sont les scientifiques ». Des milliers de variétés traditionnelles ont pu être sauvées, mais le compte est bien loin des 100’000 qui existaient avant la Révolution verte. Lancée par le gouvernement dans les années 60 pour assurer l’approvisionnement d’un pays de plus d’un milliard d’habitants, elle a misé sur la productivité.
Mais le vrai ennemi de l’organisation, établie au début des années 2000, s’appelle la mondialisation. « Les multinationales sont responsables de la disparition de la diversité », assène M. Prasad.
Récupération d’au moins 500 variétés
« Je n’ai pas la patience pour parler aux dirigeants des multinationales. Je ne veux pas perdre mon temps. Le chef de Monsanto nous a invités au dialogue mais nous ne pouvons pas changer » ce qu’ils font, explique l’activiste.
Interrogé par l’ats, le groupe agrochimique bâlois Syngenta se dit également ouvert à la discussion avec tous les acteurs qui ont un « désir authentique d’aider à créer des solutions intégrées et durables aux défis de l’agriculture ».
Dans son action au Karnataka, dont Bangalore est la capitale, l’ONG a identifié plus de 360 variétés de riz, dont seuls 137 subsistent. L’ONG veut « éduquer le consommateur » mais aussi le petit paysan, par le biais de guides financés notamment par Swissaid.
« C’est comme une Université pour l’agriculture bio » qui a d’ailleurs obtenu la certification du spécialiste mondial du contrôle dans ce domaine, le groupe suisse IMO. Selon lui, l’action de l’ONG a permis de sauver au moins 500 variétés et Sahaja Samrudha en commercialise certaines.
Coton ciblé
« Nous privilégions le système multi-semences » qui peut être utilisé pour plusieurs cultures. Le millet, les aubergines – avec près de 60 variétés – le chili, les tomates ou le maïs sont également proposés. Un chili était exporté sous la période britannique vers l’Allemagne pour les cosmétiques.
L’ONG travaille aussi sur la relance du coton indien, avec 23 variétés. Face aux tentatives controversées de Monsanto de lancer un OGM, un produit durable et indien est souhaité. Sous les Britanniques, 95% du coton était indien et 5% américain.
Le coton indien ne constitue désormais que 3% du marché, selon M. Prasad, qui attribue ce recul au soutien politique aux multinationales. Un chiffre difficile à vérifier. « Ce que les Britanniques n’ont pas réussi, les dirigeants indiens l’ont fait », provoquant la réduction de la diversité du coton, ajoute M. Prasad. »Le riz est un manifeste politique, à une roupie ou même gratuit. Personne ne parle de prix garanti aux agriculteurs. Le coton sera confronté au même problème dans les prochaines années ». Seules des variétés à haut rendement ont été promues, mais elles demandent beaucoup d’eau et des pesticides. Il faut compter 1200 roupies (environ 17 francs) pour une semence d’un kilo de coton à Monsanto.